WSOP 2016, Rendez-vous Boulevard du désespoir
Des hôtels exceptionnels, des lumières par millions, des touristes à chaque coin de rue, et en rentrant un soir, le lendemain d’un jour de pluie, je les ai encore vu aller dormir dans ce lieu impossible. Le lendemain matin, j’ai vu cette jolie demoiselle trier ses affaires, elle était là, perdue et désespérée, égarée et cherchant à sauver le peu de ce qu’elle avait. Rendez-vous Boulevard du désespoir…
Il y a un an déjà, un soir alors que je rentrais du RIO, je m’étais demandé ce que ces gens pouvaient faire dans cet endroit sordide. Pourquoi ces gens descendaient-ils le soir venu dans cet « égout » géant, ce passage d’eau en béton digne d’une course poursuite dans Grease au volant d’une Ford de Luxe ? J’avais couché mes doutes et le sentiment de tristesse qui avait pu m’envahir en voyant une telle scène, à deux pas des bracelets de champions du monde.
Avant hier soir il a plu dans Las Vegas, des torrents d’eau, des éclairs gigantesques, et forcement l’eau s’est engouffrée dans ce passage de béton, tout a été balayé, le moindre caillou, le moindre objet, mais pourquoi y aurait-il eu des objets dans ce tunnel de béton ?
Tout simplement car loin des lumières de la ville, loin des hôtels de grand standing, des gens sans argent vivent dans ces tunnels sous la route, et avant hier soir, le moindre petit objet qu’ils pouvaient posséder, c’est retrouvé mêlé entre eau souillée et désespoir, le moindre vêtement, matelas ou tapis a été propulsé au delà de leurs souffrances, dans la continuation de ce même Boulevard du désespoir.
J’ai aperçu au loin cette jolie demoiselle (car oui il ne faut pas forcement être un monstre couvert de poils pour vivre dans un égout), qui cherchait désespérément à sauver un tee-shirt, une paire de chaussures, un oreiller gorgé d’eau, mais impossible. Sur plus de 100 mètres tout ce qu’elle possédait été éparpillé, brisé, dévasté, comme si la vie voulait une fois de plus ne rien lui donner ou lui laisser.
Avant de nous asseoir à nouveau à une table de cash game dans un casino de Vegas, avant de lever les bras en hurlant de joie autour d’une table de Craps, pensons aux jolies demoiselles qui vivent dans ce monde « d’en-bas », pensons à ce vieil homme que j’ai pu voir avant hier soir pleurer une bouteille de bière à la main sur un îlot de béton pour échapper à la noyade, pensons que les lumières sont sublimes mais qu’un peu de clarté dans un monde obscure pourrait apporter à ces gens une existence un peu moins noire.
Sans le savoir, avant hier, j’avais Rendez-vous Boulevard du désespoir, aujourd’hui le Boulevard du désespoir n’a pas disparu, comme le Strip, comme Vegas qui reste cette ville fantastique mêlant millions de dollars et solitude. Demain si vous réservez dans un hôtel magnifique, n’oubliez pas, pour certains la clé de leur « chambre » amène peut être à la mort…